Les élections municipales du 23 et 30 mars arrivent dans un contexte économique particulièrement tendu. La crise est installée partout en Europe et le personnel politique est en campagne pour chercher des voix, serrer des mains et promettre du changement. Or le système représentatif contrairement à ce qu’il laisse entendre sert avant tout à ne rien changer. Ainsi le radicalisme affiché par certain-e-s au moment d’entrer en politique disparaît dès lors qu’ils et elles sont intégré-e-s dans ce système. L’accès au pouvoir, par les élections tout autant que par la réussite économique, même minime, modifie les comportements et autorise au moins quatre dérives :
- le népotisme, (fils-filles, compagnes, membres de la famille d’élu-e-s nommé-e-s à des postes clefs,)
- le clientélisme (achat de voix comme à Corbeil-Essonnes par le milliardaire Serge Dassault(1), l’affaire des chaussettes à Perpignan(2)),
- la collusion entre grand patronat et représentant-e-s élu-e-s (surfacturation de marchés publics pour financer les partis politiques) et
- la professionnalisation faisant de la politique un métier, tout ceci dans le but de préserver les avantages acquis par la classe dominante.
Les partis d’extrême-gauche appelant à un vote anticapitaliste enfermés dans la logique électorale sont le plus souvent divisés. Les énergies des militant-e-s, aussi honnêtes soient-ils/elles, sont focalisées sur des échéances sans incidence significative sur la vie quotidienne. Les déçu-e-s des partis traditionnellement au pouvoir se tournent de plus en plus vers les partis d’extrême-droite. Les politiques anti-sociales et sécuritaires menées ces dernières années ont fait le jeu des idées réactionnaires et xénophobes. Le résultat est désastreux et n’est pas prêt de s’inverser si l’on ne tente rien hors des urnes.
Pour l’anarchisme, l’électoralisme est une erreur car il détourne d’une attention politique soutenue pour ne la concentrer qu’en des moments ponctuels influencés par le contexte immédiat : c’est la crise, donc je fais une campagne sécuritaire et/ou xénophobe qui a des chances d’obtenir l’adhésion du « peuple ». Une campagne électorale dispense le reste du temps de participer à des luttes combatives, et va à l’encontre d’une réelle prise en main des décisions par la population. Pour une démocratie directe, il faut un abstentionnisme agissant. Il faut substituer à la représentativité qui éloigne de l’intérêt collectif le mandat impératif, tournant et révocable.
Il faut nous organiser sans rien attendre du haut, créer des systèmes autogérés, non hiérarchiques partant de nos besoins. Pour faire face à la crise, reprendre le terrain des luttes est nécessaire pour s’opposer à toutes les mesures d’austérité et régressions sociales, tout comme organiser une solidarité interprofessionnelle pour faire face aux attaques du patronat. Au quotidien, des réflexes d’entraide sont possibles. Comme ceux qui se sont instaurés à travers des redistributions de pains à Figuerolles à Montpellier, organisées par un collectif d’entraide réunissant des personnes du quartier. Des pratiques de solidarité et résistance collectives, pour tous les domaines de la vie tels que la santé, l’alimentation et le logement, ont été ainsi mises en place un peu partout en Grèce par la population qui subit durement la crise. Les développer pour rompre avec l’individualisme et le tous contre tous permettrait de jeter les bases d’une démocratie directe.
Le groupe Un Autre Futur de la Coordination des Groupes Anarchistes
1 : Maire pendant 14 ans puis sénateur à vie, Serge Dassault a gagné les élections en payant des rabatteurs qui proposaient des avantages aux jeunes des quartiers populaires pour les faire voter.
2 : Les élections ont été annulées car un membre du parti du maire Jean-Paul Alduy a été surpris avec des bulletins cachés dans ses chaussettes au moment du dépouillement des voix.
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