Voici un article repris de la Tribune Syndicaliste Libertaire
Prolétaires, sauvons-nous nous-mêmes !
Tous les progrès sociaux n’ont été le fruit que de la lutte et du rapport de force construits par les travailleuses et travailleurs, en activité ou au chômage, lorsqu’ils et elles se sont organisé·e·s et sont entré·e·s en action directement et collectivement. Dans cette lutte opposant les travailleuses et les travailleurs à la bourgeoisie, celle-ci n’a toujours cédé que par la contrainte ; la seule chose qui l’ait jamais faite reculer, c’est le rapport de force que nous, les travailleurs et travailleuses, avons pu construire grâce à notre organisation et notre action collective. Ce sont les luttes que notre classe a menées depuis plus de 150 ans, en s’unissant autour d’objectifs concrets (du plus modeste au plus ambitieux) ; pas les promesses de « lendemains qui chantent » portées par des politiciens qui y voient là un moyen d’accéder au pouvoir.
Il n’est pas de sauveur suprême…
Ni Dieu, ni César, ni Mélenchon, ni Hamon, ni Macron, ni aucun « tribun » n’amèneront le progrès social aux travailleuses et aux travailleurs. Quel que soit le résultat des élections, les mauvais coups pleuvront sur les prolétaires. En effet, l’État, même dirigé par le gouvernement au programme le plus « progressiste » qui soit, reste le défenseur de la légalité bourgeoise, c’est-à-dire de l’exploitation organisée du travail collectif, et l’appropriation par les classes dominantes d’une part importante des richesses créées. Tant que la bourgeoisie (patronat et actionnaires) aura le contrôle des moyens de production et de distribution, tant qu’elle aura le pouvoir économique, elle cherchera à augmenter son profit, extorqué de notre travail, au détriment de nos salaires, nos conditions de travail, de notre santé et de notre vie.
Pourtant, chaque fois que des luttes d’ampleur ont eu lieu, des politiciens se sont présentés comme les « représentants » des aspirations populaires, Mélenchon étant le dernier exemple en date de ce phénomène. Comme si les échecs du mouvement syndical, du mouvement social, allaient être résolus par la confiance dans les promesses d’un politicien et non par une réflexion stratégique permettant d’identifier les faiblesses qu’il nous faut surmonter, et par un renforcement des organisations syndicales, des organisations populaires, pour substituer à l’isolement individuel la force collective.
Face à la menace fasciste, l’urgence du combat social
Le rapport de force avec la bourgeoisie se construit au quotidien sur le lieu de travail et dans les localités, par une pratique de solidarité interprofessionnelle en continu. Aucune baguette magique, aucune promesse politicienne ne remplacera cette nécessaire construction de solidarité dans la durée. Cette solidarité ne peut, pour être efficace, être envisagée dans le seul cadre national, par le repli chauvin même estampillé « de gauche ». Bien au contraire, ce repli ne peut qu’accentuer la mise en concurrence des travailleuses et travailleurs, leur division face à la bourgeoisie, à l’heure où il nous faut au contraire présenter un front uni de résistance populaire.
Ce repli ouvre également la voie au racisme et au fascisme, là où les 4 mois de lutte contre la loi travail ont démontré que lorsque le mouvement ouvrier relève la tête, les fascistes se taisent et n’ont plus rien à dire. Le meilleur moyen de les combattre est donc de les démasquer comme alliés et serviteurs de la bourgeoisie par les luttes : à cette occasion, soient ils se taisent, soient ils soutiennent la bourgeoisie en lui servant de bras armés, avec la complaisance de l’État. Il nous faudra organiser notre autodéfense contre leurs mauvais coups.
Renforcer le mouvement syndical, renforcer les organisations populaires
Plutôt que de gaspiller notre énergie à soutenir tel ou tel politicien, nous pensons qu’il est urgent que nous la consacrions à renforcer les organisations de résistance de notre classe, au premier rang desquelles les organisations syndicales, mais également toutes les organisations de résistance populaires. Nous savons que cela exige des efforts et qu’il est plus facile pour les politiciens de promettre des victoires faciles là où ils ne créeront que les conditions de nos défaites.
Pour renforcer le mouvement syndical, il nous faut renouer avec la solidarité interprofessionnelle, en la construisant et en la renforçant dans les unions locales. Il nous faut aussi combattre la division du syndicalisme de classe, en rejetant toutes les logiques de fraction visant à confisquer les structures syndicales au profit des intérêts d’un parti. Quant à nous, nous ne voulons pas idéologiser le syndicalisme et n’avons que faire d’un syndicalisme « anarchiste » : pour nous, le syndicalisme doit être un outil d’unification de notre classe dans la solidarité et la lutte, pour développer son autonomie et ses capacités à contester le pouvoir du patronat et de l’État, et non un outil de division sectaire.
Nous défendons la perspective de la réunification du syndicalisme de classe, mais nous savons que cela ne passera pas par des formules et accords d’appareil, mais par un travail de solidarité commune à la base.