Loin de l’appel d’Emmanuel Macron à «se réinventer», on peut dire par avance que le Ségur de la santé n’inventera pas grand-chose. Toujours cette vieille méthode politicienne qui consiste à annoncer une «grande concertation nationale»… tout en en fixant par avance les résultats! Ceux-ci se situeront dans le droit fil du «monde d’avant» : peu d’investissements, mais la poursuite de la casse néolibérale de notre système de santé. Il est temps de se le réapproprier et de le placer hors de la loi du marché.
Le Premier ministre, Édouard Philippe, a annoncé que la concertation organisée au ministère de la Santé, avenue de Ségur, sera axée sur quatre «piliers» d’une future réforme de l’hôpital public.
1) La hausse des salaires
Les salaires de l’hôpital public français sont parmi les plus faibles des pays occidentaux. Le gouvernement annonce que l’objectif est d’atteindre un niveau de rémunération équivalent «à la moyenne européenne». Il est attendu de pied ferme, car cela fait des mois que les syndicats et le Collectif inter-urgences réclament en ce sens, et que le gouvernement les balade sans vergogne.
2) Une logique de financement toujours révoltante
Le gouvernement annonce qu’il veut réduire la part de «tarification à l’activité». Mais le problème, c’est bien la contradiction ce type de financement avec une logique de service public. Le Collectif inter-hôpitaux réclame son abandon pur et simple : «la règle doit être le juste soin pour le malade au moindre coût et non la recherche du tarif rentable pour l’établissement». Cela suppose «une augmentation du budget hospitalier (Ondam) d’au moins 4%».
3) Une augmentation du temps de travail
La crise du coronavirus ne leur a-t-elle donc rien appris? Olivier Véran parle de «remise en question de certains carcans qui empêchent ceux qui le souhaitent de travailler davantage». Pousser les salarié·es déjà épuisé·es au surmenage en agitant la carotte des «heures sup’», c’est surtout une façon de ne pas recruter. La fédération SUD-Santé-Sociaux évalue qu’il manque 100.000 personnes à l’hôpital public. Ce sous-effectif ne sera pas compensé par la «télémédecine» que le gouvernement, toujours à ses fantasmes high-tech, présente comme une solution.
4) Pas de solution au manque de lits
Pour finir le gouvernement souhaite davantage d’intégration et de coopération entre hôpital, médecine de ville et secteur médico-social, mais ne fait aucune promesse sur la réouverture de lits, dont le manque s’est fait cruellement sentir durant la crise du coronavirus. Il reste muet sur le secteur hospitalier privé, qui accapare un tiers du «marché» des patients, et absorbe une partie des financements publics au détriment de l’hôpital public.
Une solution : la socialisation sous le contrôle des soignantes et des soignants
L’intérêt de la population, des soignantes et des soignants, exige une logique radicalement inverse à celle du «Ségur de la santé». C’est une révolution du système de santé dont nous avons besoin, par la socialisation intégrale, et l’autogestion. Cela suppose que l’ensemble du système hospitalier, public comme privé, soit retiré des mains de l’État et des groupes financiers, et unifié. Le système de santé doit être déclaré «bien commun» ou «propriété sociale», et jouir d’un financement assuré intégralement par la Sécurité sociale, donc par la cotisation sociale.
Il sortira ainsi à la fois du budget de l’État et de la loi du marché. Placé sous le contrôle des travailleuses et des travailleurs, il renouera pleinement avec l’esprit du service public, et pourra être redéployé dans les territoires, avec des effectifs et des moyens au niveau des besoins.
Cette logique ni étatiste ni capitaliste, c’est celle du communisme libertaire.
Union communiste libertaire, 29 mai 2020
Applaudir c’est bien, se battre ensemble c’est mieux
Manifestation hebdomadaire de soutien aux revendications des soignantes et des soignants, devant l’hôpital Robert-Debré, à Paris 19e. Photos Clotilde (UCL 93-Centre)